Unis - 20 janvier 1946

UNIS était un hebdomadaire édité par le centre d’action et de défense des immigrés (C.A.D.I.)

L’ESPERANTO, la langue universelle

Certains s’étonnent de savoir que l’espéranto s’apprend au même titre que les langues vivantes.

C’est que l’espéranto existe bel et bien et ne constitue pas une utopie. Langue auxiliaire internationale, il correspond à une nécessité que chacun ressent de plus en plus, après une guerre sans précédent. Mais il ne prétend remplacer aucune autre langue. Il constitue seulement, à l’heure actuelle, l’unique exemple sérieux qui ait été fourni de la possibilité d’un outil linguistique simple, le seul exemple de langue seconde moderne ayant fait ses preuves. Personne n’en conteste plus l’utilité. Rares sont ceux qui en discutent encore la valeur intrinsèque. Quelques uns craignent seulement de s’user en une action inutile.

Que nos camarades se rassurent. L’espéranto, a près de soixante années d’existence, puisqu’il est né en 1887, et le redoutable « banc d’essai », pour lui, de deux guerres mondiales, car il est avant tout un instrument de paix. C’est une moyenne des langues européennes les plus pratiquées : anglo-saxonnes, slaves et latines, une langue logique, schématique, dépouillée avec une scientifique précision de toute complication grammaticale de ces multiples exceptions qui constituent l’essentiel des difficultés des langues étrangères. Il fait plus appel pour le vocabulaire, grâce à sa construction quasi mécanique, à l’intelligence qu’à la mémoire.

L’espéranto compte parmi ses lettres de créance l’approbation de nombreux savants linguistes du monde entier. Il était utilisé par le B.I.T., avant la guerre. Les PTT l’acceptent dans les relations téléphoniques et télégraphiques. Chacune des grandes manifestations commerciales internationales (Foires de Paris, Lyon, etc.,) l’utilisaient. En France la S.N.C.F. ouvrait régulièrement, des cours pour ses agents et les reprend peu à peu. Livres, journaux, revues, oeuvres traduites ou originales de sa littérature- - car, comme toute langue vivante, il possède sa littérature - ne se comptent plus. De nombreux pays reprennent peu à peu leurs émissions radiophoniques en espéranto. Les associations touristiques, culturelles, économiques, par milliers, l’acceptent, l’utilisent parallèlement avec l’anglais, l’espagnol ou l’allemand dans leurs ouvrages de propagande ou techniques, et font suivre régulièrement des cours à leurs adhérents.

Bref, l’espéranto vit et vivra. II est pratique et souple. Tout le monde peut l’apprendre quel que soit son degré d’instruction, j’entends par là le parler et l’écrire couramment en fort peu de temps. Non réservé à une élite intellectuelle, il s’imposera parce qu’il est accessible aux masses populaires. Et celles-ci, peu à peu, l’imposeront aux gouvernants dans l’enseignement, comme cela se voyait déjà dans certains pays.

Le grand écrivain BARBUSSE, a dit :

« Oeuvre de savoir et de bon sens, la langue commune est le premier outil par lequel tous les prolétaires et tous les souffrants se fraieront un passage de l’un à l’autre. »