L’Europe à la recherche d’une langue commune

Publié le jeudi 15 août 2002 par admin_sat , mis a jour le dimanche 8 août 2004

A titre de documentation, qui ne signifie nullement une approbation globale de tous les points énoncés, voici quelques traces fort intéressantes sur les premières démarches concrètes qui ont visé une unification de l’Europe sur la base de principes démocratiques et non autoritaires. Elles apparaissent dans l’"Enciklopedio de Esperanto" éditée en 1933 par "Literatura Mondo" (Budapest) sous les mots "Europa lingvo" (p. 130), "Paneuropo" (p. 432), "USE" (p. 554 et 555), "USE-EHhO" (p. 555) et "Zauner" (p.586).

Voir aussi l’"Appel aux diplomates" lancé par le Dr Zamenhof en janvier 1915. Les ouvrages, publications et auteurs mentionnés donnent matière à une recherche plus étendue. Certaines idées exprimées appellent des commentaires et il est nécessaires de situer ce débat dans le contexte politique de l’époque : en 1933, Hitler s’emparait du pouvoir. Compilation et traduction : Henri Masson

Remarque : dans l’original, le S de USE et de Statoj porte un accent circonflexe qui lui donne le son sh, donc "ouché" en acronyme ou "ou cho é" en épelant, même chose pour le H de EHO dont le son équivaut à celui du j espagnol..

Europa lingvo. Des dirigeants du mouvement USE (V. ce mot) proposent (et utilisent) ce nom au lieu de espéranto pour les motifs suivants. L’origine naturelle de la langue serait mieux soulignée par cette désignation parce que, pour les masses, le nom espéranto a toujours la signification de langue artificielle. Le fait que l’espéranto soit la synthèse des langues indo-européennes a été lui aussi bien connu jusqu’à nos jours, mais on n’a pas utilisé, suffisamment souligné, sa classification scientifique et son inscription parmi les langues indo-européennes. Ce n’est pas dans la structure qu’il faut chercher la cause du fait qu’il n’a pas encore conquis les masses, mais dans la méthode de propagande jusqu’à maintenant inadéquate, entachée d’erreur, etc. (Lisez USE-EHO, mai 1933) "Les espérantistes japonais constatent que si l’avis sur l’espéranto comme "la langue européenne" était pris par la majorité de nos "samideanoj" [personnes partageant la même idée] européens, la propagation de notre langue en Orient serait gravement mise en danger." (D’après la résolution du 21ème congrès Japonais d’Espéranto, 3 novembre 1933)

Paneurope. Mouvement qui vise l’union des États d’Europe comme ligue d’États et union douanière dans l’intérêt de la paix, la liberté et l’économie européennes. Le principal initiateur du mouvement est le comte Richard Coudenhove-Kalergi, qui en 1923 avait édité sa première brochure sur la Paneurope. Le mouvement paneuropéen veut atteindre son but "par la création d’une nouvelle opinion publique, par le fait de convaincre et d’enthousiasmer les dirigeants européens et les peuples pour l’idée européenne ; par un mouvement de masses qui, en prenant de l’ampleur, incitera les partis, organisations et gouvernements à aller dans le sens d’une union européenne".

L’organisation internationale est l’Union paneuropéenne (à Vienne) qui, en 1926, a organisé son premier congrès. L’Union paneuropéenne a des sections dans de nombreux pays. Le programme de Paneurope dit à propos du multilinguisme en Europe : "La Suisse donne la preuve la plus vivante, que des membres de trois des plus grandes nations du continent européen peuvent vivre ensemble en paix, dans la liberté et l’égalité des droits comme communauté politico-économique, et donc que le multilinguisme n’est pas une entrave invincible pour Paneurope." [1].

D’après Coudenhove-Kalergi, on n’aura l’intention d’adopter l’espéranto comme langue officielle de Paneurope que si les masses l’exigeront. (Lors d’un discours prononcé à Budapest le 6 mai 1930). Paneurope a beaucoup d’adeptes parmi les espérantistes. L’un des militants les plus fervents a été le Dr Edmund Sós qui, pour l’idée, a fait une vaste propagande, publié des articles, principalement dans Heroldo de Esperanto (HdE) Il fonda des sections d’espéranto au sein de l’Union paneuropéenne, traduisit le manifeste de Paneurope en espéranto et édita une brochure de 16 pages "Que veut l’Union paneuropéenne ?" à environ 10 000 exemplaires. Lors des Congrès Universel d’Espéranto de Budapest, Oxford et Cracovie (1929-1931) se tinrent des réunions spécialisées parmi lesquelles celle de Budapest fut une manifestation réussie ; y participèrent presque 300 personnes ; l’organisateur fut L. Kökeny. A noter aussi : un mémorandum du "Feu espérantiste" de Barcelone (octobre 1930) au ministre des affaires étrangères pour l’adoption de l’espéranto lors de la mise en route de la Confédération européenne, quelques articles de Gaston Waringhien et, comme oeuvre pionnière, la brochure de V. Zielinski "Europo unuigita" (Europe unifiée) en espéranto et en français, 1921, Constantinople.

(Compilation : USE)

USE. (abréviation du nom : États-Unis d’Europe). Parallèlement au Mouvement paneuropéen (voir ce mot) naquit et évolua (longtemps hors de l’attention du public) l’idée d’États-Unis d’Europe et le programme USE fut rédigé. Les principales différences entre le programmes de Paneurope et des USE sont : a) La future puissance mondiale se divise — d’après le programme paneuropéen — en cinq parties (États-Unis, Grande-Bretagne, Paneurope, Japon, URSS) alors que le programme des USE ne se divise qu’en deux parties : l’hémisphère occidental, déjà dirigé actuellement par les États-Unis, et l’hémisphère oriental, dirigé à l’avenir par USE ; b) Devront aussi participer aux USE — en fonction de diverses causes géopolitiques et sociales — la Grande-Bretagne et la Russie ; c) Comme langue officielle, le Mouvement paneuropéen propose l’anglais pendant que, d’après le programme des USE, l’espéranto est destiné à devenir la langue auxiliaire des USE. Pour relier fortement et durablement les États européens, le programme des USE propose des armées, une politique douanière et extérieure communes et une monnaie unifiée. Tactique : fonder pour toute l’Europe une organisation politico-économique (Parti USE), qui a pour tâche de réaliser le programme USE par le système parlementaire. D’après les dirigeants
de USE, les espérantistes sont destinés à devenir les initiateurs et les promoteurs du mouvement USE. Organe : USE-EHO. Édition : "Libro" (= Livre) ; Timisoara I, Roumanie. Littérature spécialisée : Josef Zauner : "Der Zusweg USE", (La Voie vers le Parti européen, L’issue USE) ; le même : "La Europanismo" (L’Européanisme).
D’après Zauner

USE-EHO. Journal pour faire la propagande pour la réalisation des USE (voir ce mot) parmi les espérantistes. Fondateur, éditeur et rédacteur Josef Zauner, Timisoara, 1 rue Lonovichi, Roumanie. Premier numéro : janvier 1930. Quatre numéros sont parus avec 24 pages en tout de format 24x 32 cm. De janvier 1931 à juillet 1933 parurent 8 numéros avec 32 pages de 32x48 cm. Rédaction vigoureuse, articles intéressants et illustrations adroites sur le problème européen et pour la propagande des USE.

ZAUNER. (tssaounère) Josef (pseudo : J. Düa) Allemand, libraire. Né le 18 novembre 1895 à Engelebrunn (Roumanie). Fonda l’édition USE à Leipzig en 1921 et il est depuis ce temps l’initiateur et le principal artisan du programme USE : États-Unis d’Europe. Depuis 1930, il édite et rédige le journal USE-EHO, organe de l’européanisme à Timisoara. En 1932, il fonda la Club des amis des USE en Roumanie. Pour diverses raisons, il fait la propagande pour l’espéranto comme langue européenne. A écrit : "La elvojo USE"), 1923 (aussi en allemand), et "Der Weg zur Europa-Partei" (La voie au Parti européen), 1931 ; "La Europanismo" (L’Européanisme).