Apprenons à abattre des murs

Publié le vendredo 15a julio 2005 par admin_sat

Lorsque j’ai commencé à apprendre l’espéranto,
je me suis rapidement senti citoyen du
monde, au sens le plus complet du terme.
Après quelques semaines, je correspondais ou
“philosophais” déjà avec d’autres partisans de
cette langue ; ce qui ne m’était encore jamais
arrivé avec l’anglais ou l’allemand, même
après plusieurs années d’apprentissage.
J’étais persuadé d’avoir enfin trouvé là LE
moyen de communiquer facilement et internationalement,
sans contrainte particulière.

Bien évidemment, j’avais très envie de faire
partager ma découverte à des connaissances
ou amis. Peut-être réussirais-je même à en
convaincre quelques-uns ? Ignorance ?
Naïveté ? Aveuglement ? Les réactions m’ont
déçu ! “Apprends donc l’anglais, ça, c’est
utile !”, “L’espéranto, mais ce n’est pas une
vraie langue, personne ne l’utilise, aucune
école ne l’enseigne.”, “L’espéranto ? Ah, oui,
ce jeu linguistique, bof !”. Et voilà, mes
grands espoirs réduits à néant ! Il me faut être
juste : j’ai tout de même reçu quelques encouragements,
mais ceux-là même qui me poussaient
dans cette voie ne voyaient pas d’intérêt
pour eux-mêmes.

Les organismes internationaux, les institutions
mondiales, les écoles ne considèrent
donc pas l’espéranto comme un réel moyen de
communication. Cette conclusion est sûrement
motivée par des études sérieuses, des
comparaisons, des débats. Dans mon esprit, le
doute commença à s’installer. Après tout, les
spécialistes, les politiciens, les pédagogues
ont certainement raison ; je ne suis pas spécialiste,
j’ai donc tort ! Alors quoi ? L’espéranto
ne serait-il qu’une chimère défendue par quelques
utopistes ?

Malgré mes doutes et mes réflexions, la langue
internationale me tirait toujours vers elle
et je recevais des messages de gesamideanoj
(personnes partageant les mêmes idées) qui
me prouvaient qu’ils étaient heureux et trouvaient
un grand plaisir dans ce mouvement.
La motivation me revint grâce à un livre,
prêté par une amie espérantiste convertie :
Le défi des langues – du gâchis au bon
sens
” de Claude Piron (éd. L’Harmattan,
Paris, 1994). L’auteur, qui a passé de nombreuses
années à l’ONU comme traducteur
professionnel, y explique pourquoi les États
préfèrent se compliquer la vie plutôt que de se
la simplifier. En fait, ils souffrent du syndrome
de Babel : maladie fort répandue qui
persuade ceux qui en sont atteints qu’il
n’existe pas d’autres solutions que d’employer
des langues nationales même au prix
d’énormes efforts et de résultats décevants.
Ainsi donc, cela signifierait que nous, espérantistes,
serions sains et “bien-pensants”
alors que les nations seraient malades ? Belle
idée ! Avoir les résultats obtenus dans la communication
inter-peuples par l’espéranto, on
ne peut qu’adhérer à une telle explication. Me
voilà rassuré ! Je ne suis plus seul au monde à
partager cette idée. Nous sommes nombreux
et heureux d’avoir trouvé LA solution à un
problème complexe tout en respectant chaque
culture, chaque langue, chaque être.
Apprenons donc à abattre les murs des préjugés,
à ne plus accepter une « vérité » comme
vraie parce qu’elle émane d’un « spécialiste ».
Voyons par nous-mêmes, comme des gens
responsables, si ce qui se dit est véridique ou
arrangé. Osons ne plus suivre bêtement une
majorité qui ne sait pas de quoi elle parle.
Riez, moqueurs, je ne vous écoute plus !

Jean-Marc Leresche, avril 2005.