Cent ans de gâchis

Publié le vendredi 15 juillet 2005 , mis a jour le lundi 3 décembre 2007

Polyglotte, licencié de grec et de latin, agrégé en langues modernes,Théophile Cart (1855-1931) fut lecteur à l’Université d’Uppsala, en Suède (1891-1892) puis professeur au Lycée Henri IV (1892-1921) et à l’École des Sciences Politiques à partir de 1893. Le 3 septembre 1906, il adressa un rapport sur l’enseignement des langues au ministre de l’Instruction Publique. Le présent extrait révèle que, depuis près d’un siècle, comme il l’avait pressenti, on n’a jamais cessé de tourner en rond :

Le malaise résultant d’un tel état de choses est si réel, qu’on s’efforce d’y apporter remède, en tous pays, par la place, de plus en plus grande, qu’on réserve, dans l’enseignement public, aux langues vivantes, alors que, d’autre part, la somme des connaissances générales qu’il convient d’acquérir, va, elle aussi, en augmentant.

Il n’y a aucune témérité à prédire que la solution par l’étude des langues étrangères, toujours plus nombreuses et mieux apprises, aboutira à la faillite. Vainement on s’efforce de la retarder par de fréquents remaniements de méthodes. Elle est fatale, parce que la mémoire a ses limites. Le nombre de personnes capables d’apprendre ‘pratiquement’ deux ou trois langues étrangères, avec tant d’autres choses, en outre est infime ; or c’est à un nombre d’hommes continuellement croissant qu’il importe de communiquer avec des nations de langues différentes, de plus en plus nombreuses.”

Le professeur Cart fut l’un des défenseurs les plus fermes et les plus compétents de l’espéranto. Cent ans ont été perdus faute de l’avoir écouté.