L’espéranto lave-t-il plus blanc ?

Publié le vendredo 22a novembro 2002 par admin_sat , mis a jour le dimanĉo 8a aŭgusto 2004

Les poids lourds de la tyrannie et les pires régimes politiques du 20ème siècle avaient une conception très particulière de la communication. Leur haine farouche de l’espéranto n’est pourtant pas parvenue à l’éradiquer. Une langue internationale sans liens avec quelque puissance que ce soit, indépendante et neutre, ne représentait pas le véhicule linguistique idéal pour servir leurs objectifs. Hitler avait stigmatisé l’espéranto dès septembre 1922 dans un discours prononcé à Münich et confirmé son hostilité dans "Mein Kampf" (1925-1927). Pour lui comme pour Staline, pour Salazar comme pour Ceaucescu, pour Kim-Il sung comme pour Saddam Hussein et bien d’autres, la pire des malédictions se trouvait dans une langue qui visait l’accès économique, pratique, rapide et vraiment démocratique à une communication équitable à travers les frontières. Le mensonge officiel qui pousse les peuples à se jeter les uns contre les autres passe d’autant mieux qu’ils sont maintenus dans l’incapacité de découvrir et de comparer, par les échanges et le dialogue constructif, la réalité de leur condition sociale.

Les régimes prétendument démocratiques n’ont pas brillé pour autant. Le dédain ou le mépris affiché par certains hommes et régimes politiques à l’égard de l’espéranto, alors qu’ils prétendent défendre la démocratie et la liberté, voire même le "Bien", en dit long sur leur honnêteté. A vrai dire, l’honnêteté, c’est pour eux un boulet (Est-ce coté en Bourse ? Combien ça rapporte ?...) : c’est bon dans les discours, pas dans les faits !

La démocratie, ça commence par la langue, précisément par la possibilité de s’exprimer dans une langue qui ne nous est pas étrangère, ou le moins possible. Or, pour la totalité de la population mondiale, l’espéranto est sans aucun doute la moins étrangère des langues étrangères du fait que, linguistiquement, il porte en soi une part du génie de chacune d’elles et qu’il s’enrichit des cultures auxquelles elles sont liées au fur et à mesure qu’il progresse.

Un Iranien de Tabriz, Gader Mohammadi, qui a accueilli des visiteurs espérantophones de Norvège et de Nouvelle-Zélande alors que, sur les traces de Marco Polo, ils parcouraient la Route de la Soie à vélo depuis la Chine, écrivait dans un courrier électronique récent : "Jamais je n’ai pensé qu’il pouvait être aussi simple de pouvoir se rencontrer, parler et exprimer ses sentiments avec un étranger ; ça s’est fait avec l’espéranto. Donc, vive l’espéranto !".
Ainsi, 143 ans après la naissance de Ludwik Lejzer Zamenhof (15 décembre 1859 [1]) et 85 ans après sa mort, se réalise toujours ce à quoi il avait aspiré en offrant au monde une langue sans droits d’auteur et excluant tout monopole :

"Je ne vois en tout homme qu’un homme et je n’apprécie chaque homme que par sa valeur personnelle et ses actes. Je considère comme barbare toute offense ou pression à l’égard d’un homme parce qu’il appartient à un peuple, à une langue ou à une classe sociale autres que les miens." (Homaranismo, 1913).

"La fraternisation entre hommes libres et égaux en droits est facile, mais lorsque les uns se comportent en dominateurs à l’égard des autres, tout cela est impossible." (Appel aux diplomates, 1915.
Alors que, dans des contrées reculées de notre globe, les habitants n’avaient pas besoin de verrouiller leurs portes et qu’il existait des traditions d’hospitalité, l’insécurité va aujourd’ hui de pair avec le triomphe de cet attrape-nigaud mercantile (en langage clair : ce piège à cons) nommé "Halloween" [2] : 16% des femmes des États-Unis portent une arme à feu [3].

La religion de l’argent instaure et généralise partout un climat de méfiance réciproque qui a eu cours dans les pires moments du nazisme et du stalinisme. Honte suprême : l’enfant — naturellement porté vers la confiance et l’admiration envers l’adulte — doit être mis en garde ! Idem dans la relation adolescentes et garçons, femmes et hommes.

Si le président Chirac veut vraiment "éradiquer la violence de l’école" — comme il l’a dit le 30 octobre — alors, qu’il commence, entre autres, par réaliser sa promesse de donner une place à l’espéranto dans l’enseignement !

Le "Bien" arrive...

Sauve qui peut !

Ce qu’il faut faire savoir au monde et rappeler sans relâche, c’est qu’un Axe — qui prétend être celui du "Bien" — manifeste sa volonté d’imposer au monde des "valeurs" [4] en fait génératrices du pire. Ben Laden et Saddam Hussein en sont quelques fruits parmi une multitude d’autres. Extrémisme et fanatisme sont les retombées inexorables d’un comportement spoliateur, arrogant, cynique. Un excès engendre l’excès inverse. Le désespoir rend fou. Ni meilleur ni pire que les autres, le peuple des États-Unis est tombé sous l’emprise d’un système mercantile de la pire espèce que pressentait et redoutait le président Eisenhower [5].
Une société dans laquelle ce n’est pas le meilleur des êtres qui se révèle, mais le pire... c’est ça, leur réussite !... Cette "réussite" dont Coluche disait qu’elle donne envie d’échouer !

Ce qu’il faut faire savoir au monde,

dans l’intérêt général :
Tutmonde diskonigenda en la ghenerala intereso

(...)it is in the economic and political interests of the United States to ensure that if the world is moving toward a common language, it be English ; that if the world is moving toward common telecommunications, safety, and quality standards, they be American ; that if the world is becoming linked by television, radio, and music, the programming be American ; and that if common values are being developed, they be values with which Americans are comfortable."
David Rothkopf anaging director of Kissinger Associates, "In Praise of Cultural Imperialism ?"
Foreign Policy, Number 107, Summer 1997, pp. 38-53
"il y va de l’intérêt économique et politique des États-Unis de veiller à ce que, si le monde adopte une langue commune, ce soit l’anglais ; que, s’il s’oriente vers des normes communes en matière de télécommunications, de sécurité et de qualité, ces normes soient américaines ; que, si ses différentes parties sont reliées par la télévision, la radio et la musique, les programmes soient américains ; et que, si s’élaborent des valeurs communes, ce soient des valeurs dans lesquelles les Américains se sentent à l’aise."
David Rothkopf
directeur du cabinet de consultants Kissinger Associates.
"In Praise of Cultural Imperialism ?" (En éloge à l’impérialisme culturel ?). Foreign Policy, n° 107, Été 1997, pp. 38-53
"Estas en la ekonomia kaj politika intereso de Usono zorgi ke, se la mondo adoptos komunan lingvon, ghi estu la angla ; ke se ghi orientighos al komunaj normoj sur la terenoj de telekomunikado, de sekureco kaj de kvalito, tiuj normoj estu usonaj ; ke, se ghiaj diversaj partoj estos kunligitaj per la televido, la radio kaj la muziko, la programoj estu usonaj ; kaj ke se ellaborighos komunaj valoroj, ili estu valoroj en kiuj Usonanoj sentas sin komforte."
David Rothkopf
Direktoro de la oficejo de konsultantoj Kissinger Associates.
"In Praise of Cultural Imperialism ?" (En éloge à l’impérialisme culturel ?). Foreign Policy, n° 107, Été 1997, pp. 38-53