La crise des médias

Publié le sabato 12a februaro 2005 par admin_sat , mis a jour le sabato 12a marto 2005

Peu à peu, partout dans le monde, quand ce ne sont pas des groupes de pression politiques ou religieux qui les pilotent, les médias deviennent les instruments de propagande et de conditionnement au service de groupes financiers ou industriels, ou de détenteurs de grosses
fortunes qui ont fait main basse dessus.

Journaliste de grand renom, ancien directeur de la rédaction de France Inter, Claude Guillaumin avait soulevé, dès 1994, le problème de la difficulté d’être journaliste dans un ouvrage au titre provocant : “Faut-il brûler
les journalistes
 ?” [1]

Plus de dix ans après, le problème a pris de l’ampleur. Ignacio Ramonet a déjà traité divers aspects de ce même sujet dans deux ouvrages fort documentés publiés chez
Galilée : “La tyrannie de la communication” (1999) et “Propagandes silencieuses” (2001).

Aujourd’hui, il en est venu à constater que : "De plus en plus de journalistes considèrent que ce sont leurs opinions - rarement étayées
 qui sont sacrées, tandis qu’ils n’hésitent pas à déformer les faits pour les contraindre à justifier leurs opinions.
"

C’est très précisément ce que les usagers de l’espéranto peuvent constater depuis que cette langue existe, y compris dans “Le Monde”. Homo stultus ?...

Prix Nobel de Médecine 1913, Charles Richet (1850-1935), plaida maintes fois en faveur de l’espéranto, et il
prit ouvertement sa défense comme le fait aujourd’hui
le professeur Albert Jacquard [2].

Dans un chapitre de son livre “L’Homme stupide [3], sous le titre “Les grenouilles d’Aristophane”, Charles Richet avait comparé les pourfendeurs de l’espéranto à ces batraciens :
D’ailleurs pourquoi insister ? C’est être trop naïf que de vouloir répondre à ces objections ? car elles manquent de sincérité. Elles peuvent toutes se condenser en une seule parole qui, comme un glas funèbre, retentit à
chaque progrès : Ce n’est pas intéressant !
(...) Cette réforme, qui changerait la face du
monde, est possible, même facile. On le devine ; on le sait ! Mais quoi ! Ce n’est pas intéressant.
Voilà quelle est notre insouciance, notre frivolité,
notre incompréhension de l’avenir.
Voilà quelle est surtout, disons le mot, notre stupidité. Quand il s’agit d’une grande chose qui inaugurerait un nouvel état d’âme chez les hommes, une régénération de l’humanité, Homo stultus se réveille bruyamment pour la
combattre. Et, comme les grenouilles d’Aristophane, il
se contente de clamer : “Brekekekek, coax, coax
“.

ou singe fou ?...

Bien plus tard, dans “Le singe fou” [4], un ouvrage destiné à la jeunesse, un citoyen des États-Unis, émigré hongrois, Albert Szent-Györgyi (1893-1986), prix Nobel de Médecine 1937, avait écrit : “Le monde actuel est une Gérontocratie, dominée par des personnes dont le cerveau est gelé depuis avant l’âge atomique. Ils agissent comme il était peut-être bon d’agir avant cet âge, mais leurs actions restent sans rapport avec le nouvel ordre des choses.

Et comme ceux qui tiennent les commandes aujourd’hui sont profondément marqués par les enseignements anglicisés de cette gérontocratie, les perspectives ne sont pas réjouissantes. Il est à craindre que le dernier tsunami
n’aura pas permis aux peuples de prendre conscience que le temps est venu de raisonner, d’agir et de vivre autrement.

Un tsunami d’une tout autre nature, la déferlante médiatique, menace les esprits et vise à transformer l’humanité en un troupeau docile guidé par des grands prêtres de la consommation.

La vie “à l’américaine” est un modèle désastreux pour toute l’humanité, y compris pour les État-Unis.

ou Diplo... docus ?

Sous le titre “Un monde polyglotte pour échapper à la dictature de l’anglais“, dans le même numéro du "Monde Diplomatique", Bernard Cassen, président d’honneur
d’ATTAC-France, bricole un Yalta linguistique à la façon dont les gouvernements de la Grande-Bretagne et des États-Unis avaient, par un accord occulte, en 1961, partagé le monde en une zone anglophone nommée "Le Centre", et une zone du non-anglais nommée "La Périphérie" [5].

Curieusement, Cassen reprend ce même terme de "périphérie" pour situer les langues qui n’appartiendraient pas au groupe des quelques langues dominantes qu’il désigne sous
l’épithète de "centrales". Elles pourraient être l’allemand, l’arabe, le chinois, l’anglais, l’espagnol,
le français, l’hindi, le japonais, le malais, le portugais, le russe, le swahili !

En fait, la trouvaille est d’un linguiste néerlandais
relayé par Louis-Jean Calvet. Ce système reviendrait à remplacer un impérialisme unicéphale par un impérialisme multicéphale.

Mais il y a mieux : le groupe des langues dites "centrales" se divise lui-même langues “supercentrales" et une langue (oui : une !) “hypercentrale" ! Faut-il être hyperdevin pour comprendre de laquelle il s’agit ?

Ce multilinguisme ramène inexorablement au tout-anglais, à une langue qui n’est pas neutre et dont l’une des vocations déterminées par les compères de la conférence anglo-américaine de 1961 était de modifier, à leur avantage, les structures mentales des habitants de
la "Périphérie". Pour Bernard Cassen, ancien professeur d’anglais, autrefois directeur du département d’anglais de l’Université de Vincennes, qui suggère cette solution boîteuse et inéquitable, l’espéranto n’existe pas, bien
que cette langue soit l’une de celles dans lesquelles
paraît LMD en édition électronique [6].

Henri Masson