Moi et l’espéranto — Début de la guerre entre l’Iran et l’Irak

Publié le jeudi 1er mars 2007 , mis a jour le vendredi 14 janvier 2011

En fait, avant la révolution, l’espéranto progressa beaucoup en Iran, et il en était question dans la presse et même de la tenue d’un congrès universel d’espéranto en Iran.

Reza Kheir-Khah

Même après la révolution, après un peu de stagnation, l’espéranto commença à reprendre vigueur, et des cours apparurent durablement, même dans des mosquées. Mais la guerre, de par son caractère, met toujours fin aux mouvements, par exemple pour les droits de l’homme, les améliorations sociales et autres, telles que l’espéranto. Parce que lorsque la guerre est quelque part, on veut utiliser l’énergie, la force et le talent de tous pour son succès. Par ailleurs, lorsque quelque chose comme l’espéranto vient de l’extérieur, dans un climat de guerre, il y a toujours de la suspicion à son encontre.

Téhéran fut aussi parfois bombardée durant la guerre, ce qui eut pour effet de provoquer pour beaucoup d’hommes la fuite vers ou auprès d’autres villes, ou même vers la montagne ! L’espéranto reçut donc aussi un coup dur en cette affaire et certaines grandes réunions et des cours durent cesser. Il y avait cependant des gens et des groupes qui voulaient de toutes façons
poursuivre cette activité qui, à leur avis, dans une telle situation, pouvait leur procurer l’espoir et la joie.

J’avais un ami qui habitait près de l’aéroport de Téhéran, mais du fait que son domicile se trouvait dans un grand immeuble nouvellement construit et suffisamment solide, ce lieu était considéré comme un refuge sérieux ! Quelques uns des membres de sa famille quittèrent leur domicile et habitèrent chez lui. Lui-même et son épouse souhaitaient apprendre l’espéranto et nous commençâmes alors le cours ici. Quelques uns de ses amis et membres de sa famille se joignirent au groupe, et nous eûmes alors là un cours hebdomadaire. Je me souviens que, parfois, durant le cours, nous entendions l’alarme pour une attaque d’avions irakiens, mais nous nous étions déjà habitués à ça et nous pensions finalement que si des missiles venaient sur nous, nous ne pourrions rien faire pour les en empêcher, donc autant les ignorer et s’occuper d’apprendre l’espéranto.

J’ai appris qu’alors, à Téhéran, quelques espérantistes proposaient leur logement comme lieux pour les cours d’espéranto. Ceci montra que la guerre, malgré tous les méfaits, avait aussi des tels effets positifs pour le rapprochement des familiers et des amis.

La guerre dura jusqu’en 1988. Entre-temps, il y avait eu beaucoup de progrès pour le mouvement, mais aussi beaucoup d’entraves à propos desquels j’ai un peu écrit dans le numéro précédent. L’un des effets de la guerre fut que des espérantistes, comme des millions d’hommes, émigrèrent d’Iran, et ceci affaiblit partiellement notre mouvement. Bien que bon nombre d’entre eux soient restés ou qu’ils soient en contact proche avec des “samideanoj“ d’Iran et apportent aussi leur contribution.

Du fait que j’ai appris l’anglais à l’université, bon nombre de mes amis étaient ceux qui maîtrisaient le mieux la langue et avaient le plus de chance, de motivation et d’occasions pour émigrer. Malgré de nombreux encouragements de leur côté pour m’inciter à émigrer aussi, je ne pouvais le faire, en raison du nombre de familiers et amis qui devaient cependant rester là (sans parler d’autres problèmes, par exemple financiers). Donc je ne quittai l’Iran que lorsque la guerre prit fin (un an après).

Dans l’Iran d’alors, nombreux étaient ceux qui avaient un passeport pour pouvoir fuir d’urgence le pays, si la situation venait à se dégrader (l’utilisation de bombes chimiques par l’Irak était déjà l’un de ces cas), mais je ne possédais pas ça non plus. Cependant, la destinée avait pour moi un plan tout à fait inattendu.

Mais je raconterai cela la prochaine fois.

Reza Kheir-Khah
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