Pour une pédagogie des têtes bien faites

Publié le mars 2003 par admin_sat , mis a jour le samedi 21 août 2004

Montaigne avait exprimé sa préférence pour les têtes bien faites plutôt que bien pleines.
Professeur au Collège de France, Antoine Meillet (1866-1936) avait écrit pour sa part, en 1918, dans “Les langues dans l’Europe nouvelle” : “Si l’apprentissage des langues étrangères est poussé à fond de manière à profiter à l’esprit, il demande un temps immense. S’il est superficiel, il n’apporte rien à la culture intellectuelle”.

Nous voyons aujourd’hui les résultats de la préférence donnée dans l’enseignement aux têtes bien pleines, si pleines que certains s’imaginent qu’il n’y a plus de place pour l’espéranto alors que son intérêt tant pédagogique qu’éthique justifie largement son introduction dans l’enseignement.
En plus d’être une langue qui aide à découvrir et à aimer les langues, tout en étant un prodigieux instrument de communication entre des peuples de langues différentes, l’espéranto est en effet, en plus, une école de civisme planétaire, précisément ce dont le monde a le plus grand besoin aujourd’hui.

L’éthique et les puces

L’espéranto en fait encore sourire certains, c’est vrai. Mais surtout ceux qui n’en connaissent guère plus que le nom.
D’autres idées ont fait sourire dans le passé : faire voler les plus lourds que l’air ; reproduire de la musique avec un grammophone ; se parler d’un lieu éloigné de l’autre au bout d’un fil, puis sans fil ; le vote des femmes ; la conduite automobile par des femmes ; la nécessité de préserver l’environnement ; etc.

Sans cesse accrues par la production de nouvelles puces et des gigantesques capacités de mémoire, les performances de l’informatique et l’Internet à haut débit permettent des développements faramineux. Ces réalisations sont hélas trop souvent utilisées de façon pernicieuse, pour le meilleur comme pour le pire. Mais il en est de même pour le sexe tout comme pour le nom même de Dieu dont on voit aujourd’hui l’usage honteux qui est fait dans deux camps belligérants aussi condamnables l’un que l’autre.

Si les jeux informatiques peuvent être parfois de formidables auxiliaires éducatifs, ils peuvent aussi conduire à des comportements totalement inconscients. Certains jeux électroniques familiarisent avec l’idée de tuer des êtres humains sans se poser de questions, sans “état d’âme” et préparent l’esprit à croire que la vraie guerre n’est rien d’autre, à l’état adulte, que la transposition professionnelle de jeux d’adolescents.

Les qualités propédeutiques de l’espéranto comme enseignement préparatoire à celui des autres langues est déjà un motif valable et suffisant à lui seul pour justifier son introduction dans les programmes. Mais le fait qu’il soit, en plus, porteur de valeurs morales, de par ses origines mêmes et de par la stature morale de celui qui en a créé les bases, cet intérêt est considérablement agrandi.

Les enfants et les jeunes aiment naturellement l’espéranto du fait du caractère génial de la langue, mais aussi de l’esprit qui l’anime. Il suffit d’entendre leurs propos contre la guerre lors de manifestations pour se rendre compte de leur répulsion face à la xénophobie, au racisme, aux fanatismes religieux et politiques dont découlent fatalement des abominations.

H.M.