Wall Street 1929-1987...2009

Publié le jeudi 14 mai 2009 par Vito , mis a jour le vendredi 15 mai 2009

Je ne suis pas compétent en ce qui concerne la finance, ni personnellement intéressé par les fluctuations des cours d’actions parce que je ne suis pas joueur en bourse. Cependant, quelques mots concernants ces affaires.

Le 18 octobre (1987) à la bourse de New-York, qui donne le ton à toutes les autres, les cours se sont subitement écroulés. Cet événement est survenu à l’improviste, après une période de plusieurs années d’une croissance persistante, évidemment artificielle : elle ne pouvait durer longuement. Quelques experts, certes, comprenaient cela, mais personne n’avait prévu une chute aussi soudaine, apparemment causée par l’arrêt brutal de la confiance universelle en la prospérité des Etats-Unis.

Cependant, jusqu’à récemment, les financiers et économistes se sont vantés de posséder désormais des moyens techniques efficaces pour éviter et même empêcher de tels séismes. Ces éminents messieurs ne manquent pas d’assurance et d’aplomb.

Ils reprochent, peut-être à juste titre, aux marxistes de raisonner selon des critères caducs du 19e siècle. Eh bien, est-ce qu’eux-mêmes ne retardent pas d’un siècle, ou au moins d’un demi-siècle ?

Les spécialistes et les journalistes ont immédiatement évoqué le krach de 1929 que suivit la longue et profonde crise des années trente dans tout l’Occident. En superficie, les choses, certes, sont semblables, mais entre les deux cas, je vois une différence essentielle.

Après 1929 suivirent le marasme économique et le chômage. Actuellement, ce même fléau n’existe pas. Il s’est installé depuis longtemps, indépendemment des événements financiers. Au cours des dernières décennies se suivirent plusieurs révolutions techniques (électrique, robotique, électronique, informatique) qui ont radicalement changé les moyens de production et l’ensemble de la situation industrielle. Les spécialistes orthodoxes n’ont pas vu ou n’ont pas voulu voir ces changements. Ils ne voulaient pas admettre que les circonstances nouvelles obligeaient à un nouveau regard sur les choses. Il ne s’agit plus de crises "cycliques" mais d’une maladie chronique, pricipalement causée par la surproduction des machines modernes qui remplacent déjà la force humaine. Pour soigner la maladie, il faut, en premier lieu, diviser le temps de travail non plus entre deux ou trois équipes de travailleurs, mais entre quatre, entre six. Et que chaque travailleur reçoive un salaire favorisant suffisamment le pouvoir d’achat pour consommer la totalité de la production des machines. Mais où trouver l’argent nécessaire ? Eh bien que font les Etats en temps de guerre, et que font, actuellement, les Etats-Unis ? Ils font simplement imprimer une certaine quantité de billets dont la valeur est conventionnelle. Il faudrait juste que cette valeur soit conventionnellement éphémère pour ne pas rendre possible une accumulation de richesses fictives. Au lieu de cette richesse artificielle, la monnaie serait seulement un signe adapté et interchangeable avec la quantité disponible des marchandises produites.

J’ai seulement, à grand trait, esquissé la théorie des abondancistes qui fut développé il y a un demi-siècle par J. Duboin, Bellamy etc. Sa réalisation serait possible sous la condition absolue d’une organisation mondiale anationale : parce que, aussi longtemps qu’existeront des Etats nationaux souverains avec budgets séparés, économies séparées, systèmes monétaires séparés, existera entre ces Etats nationaux une concurence drastique, sauvage ; et si l’un d’eux voulait établir à l’intérieur de ses frontières ce nouveau système économique, il ne pourrait bientôt pas résister à cette concurrence.

De cet état des choses actuellement prédominant résulte des nations "riches" avec quelques grands riches et quantité de chômeurs pauvres, et des nations pauvres dans lesquelles, sauf peut-être quelques chefs d’Etats vivant dans le luxe, tout le peuple vit dans la misère, ou meurt de faim.

Est-ce que, un jour, l’humanité aura intellectuellement assez évolué pour être capable de s’extirper de cet état des choses chaotique et afligeant ?

Raymond Laval (en Espéranto Valo), dans le recueil Vortoj de Valo kun studoj kaj artikoloj, Broŝurservo de SAT, eld. 1995, p.113-4. Paru originellement dans la revue Laŭte ! en janvier 1988. Traduit de l’Espéranto par Louis Gohin (janvier 2009).

Voir la version originale en espéranto sur le site de SAT :
http://www.satesperanto.org/Wall-St...