Ségolène

Publié le vendredi 5 janvier 2007


Bonjour,
J’ose espérer que vous n’allez pas nous vendre aux USA et en général aux anglo-saxons ; Cependant vous savez qu’ils font tout pour nous coloniser et imposer la langue anglo-saxonne. Or il n’y a qu’une solution à appliquer rapidement : déclarer que l’ESPERANTO doit être la langue-pont des Européens afin de protéger toutes les langues y compris l’anglais littéraire et afin que les anglophones de naissance soient à égalité dans les instances européennes.
Ci-joint un document qui précise ma pensée.
Qu’en pensez-vous ?
<brAVEC MES RESPECTS ;
Francis BERNARD


Cher Monsieur,
Par courriel du 21 novembre, vous avez appelé mon attention sur votre souhait de voir la langue dite Esperanto devenir la langue pont des Européens afin que la domination de la langue anglo saxonne, pour reprendre vos propres termes, cesse son emprise ;
Sur le fond, je regrette la perte d’influence de la langue française et son recul face à l’anglais, mais je suggère d’autres solutions que celle du recours à cette langue intermédiaire qu’est l’esperanto.
La diversité culturelle qui caractérise notre Europe est à la fois un atout et un défi. La diversité linguistique est bien sûr une richesse mais, il faut le dire, elle est aussi un obstacle. La France, dont la langue est pourtant parlée par 180 millions de personnes dans le monde perd en influence car elle se cantonne à des combats idéologiques ; elle n’œuvre pas concrètement pour que les citoyens de l’Union se comprennent et se connaissent mieux, non en adoptant une ou des langues communes mais en se parlant et se comprenant mieux grâce à une augmentation des moyens consacrés à la traduction des œuvres, écrites, théâtrales, cinématographiques ou
audiovisuelles. Une idée simple : à l’heure actuelle, les frais de traduction liés au seul fonctionnement des instances communautaires sont considérables et représentent déjà 2€ par habitant ; dans l’Europe à 23(*), ils s’élèveront à 3€. Ces dépenses sont la contrepartie du respect de la diversité linguistique garantie dans le traité, mais les citoyens de l’Union, eux, en perçoivent ils véritablement les effets ? Un transfert d’une partie, même faible, par exemple 10% du budget de traduction interne, vers un fonds européen d’aide à la traduction, ne mettrait pas en péril le fonctionnement de nos institutions communautaires et permettrait d’augmenter le budget culturel de près de 50%. Une telle mesure permettrait d’améliorer la circulation des œuvres et des artistes, et donc le brassage culturel dans tous les domaines, en utilisant toute une gamme d’outils dont certains existent déjà mais souffrent d’un manque cruel de moyens financiers.
Et au-delà de la sphère des créateurs, c’est le citoyen qui doit rencontrer l’autre, sans que l’obstacle linguistique nuise à l’échange. Je suis convaincue là aussi par le modèle scandinave de l’« intercompréhension entre langues apparentées » ; ce concept de « familles de langues », les Scandinaves l’ont compris et appliqué depuis longtemps : un norvégien, un danois, un suédois se comprennent entre eux en parlant chacun sa propre langue. Nous, au Sud de l’Europe, nous avons la chance d’être une communauté des langue romanes. Savez vous qu’une soixantaine d’heures suffisent pour acquérir les rudiments permettant à un français de lire et comprendre un locuteur italien, espagnol, portugais et de communiquer avec lui, chacun parlant sa langue, sans passer par la langue tierce qu’est l’anglais ? Umberto Eco l’a écrit en 1993 : « une Europe de polyglottes n’est pas une Europe de personnes qui parlent couramment beaucoup de langues, mais de personnes qui saisissent le génie, l’univers culturel que chacun exprime en parlant la langue de ses ancêtres et de sa tradition » , car « le premier instrument du génie d’un peuple, c’est sa langue » (Stendhal).
J’espère que ces quelques suggestions vous auront convaincu de l’intérêt que je porte à ce dossier, même si, en cette affaire, nos propositions divergent sur la meilleure façon d’aboutir !
Je vous prie d’agréer, cher Monsieur, l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Ségolène Royal
Bonjour Madame Ségolène ROYAL,
J’accuse réception de votre courriel du 16-12-2006 à 11h 32. C’est avec plaisir que j’ai commencé la lecture car vous montrez l’intérêt de répondre à vos concitoyens. Malheureusement, j’ai vite déchanté. Bien qu’il soit normal de ne pas avoir le même point de vue que moi sur un sujet, il est anormal de me répondre négativement à ce problème linguistique posé car vous montrez là une ignorance totale du sujet et en particulier des interventions positives de vos prédécesseurs socialistes !
Je rappelle ma question d’ordre linguistique : face à l’hégémonie anglo-saxonne, je vous demandais de mettre dans votre programme l’usage de l’Espéranto comme langue-pont neutre internationale en vous présentant des arguments dont le rapport GRIN à l’Education Nationale.
En réponse vous présentez des arguements contradictoires et d’autres qui relèvent des arguments périmés exprimés par les hauts fonctionnaire de l’Education Nationale et transmis par le gouvernement de droite actuel, ignorant les interventions des députés communistes, socialistes et UMP de ces dernières années, à l’Assemblée Nationale, en faveur de l’Espéranto ! En fait, votre réponse est : vive le plurilinguisme ! Comme si tous les travailleurs avaient le temps d’apprendre plusieurs langues et de les parler couramment ! Or vous savez qu’avec cette politique injuste, vous favorisez uniquement les anglo-saxons en terme d’emplois et d’argent ! Oubliez-vous que vous êtes française et européenne ? !
Dans notre pays de démocratie, c’est "cause toujours". Mais c’est aussi une chose d’être obligés d’avoir une République présidentielle et une autre de choisir ses députés et autres élus !...
Enfin, je regrette qu’en réalité votre courriel n’ait pas été écrit par vous qui semblez être une personne intelligente mais n’ayant pas le temps de répondre mais par un(e) secrétaire incompétent(e) en la matière. Et c’est très regrettable pour l’avenir de la France et de l’Europe !
Je vous prie d’agréer, Chère Madame Ségolène ROYAL, l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Francis BERNARD
président de l’association "ESPERANTO-info" enseignant retraité, membre de l’ordre des Palmes Académiques.

* Remarque : Nous étions à 25 lorsque Ségolène Royal a donné cette réponse, et nous sommes passés à 27 au 1er janvier 2007.