Syndicalisme et espéranto, d’hier à aujourd’hui

Publié le vendredi 29 septembre 2006 , mis a jour le mardi 3 octobre 2006

Motion de la Confédération Générale du Travail CGT votée le 10 octobre 1906 à Amiens lors de son quatrième congrès :
Il nous suffira d’en appeler à la mémoire de tous les congressistes qui ont assisté à des Congrès Internationaux pour montrer l’extrême difficulté qu’entraînent les sept ou huit langues qu’on y est, à l’heure présente obligé de parler et l’énorme économie de temps qui résulterait de l’emploi d’une seule langue dans ces Congrès où la traduction plus ou moins fidèle absorbe le plus clair du temps des congressistes.

Nous croyons donc que le Congrès Confédéral ferait besogne des plus utiles en s’associant aux voeux émis en faveur de l’Espéranto, dans les congrès corporatifs des peintres, des employés, des chapeliers, des céramistes, etc... et de plus, en votant l’ordre du jour suivant que nous avons l’honneur de lui proposer

Le Congrès :

Considérant que l’émancipation intégrale des travailleurs ne peut s’opérer qu’internationalement mais que les différences de langage sont une entrave matérielle et presque insurmontable à l’entente des prolétaires de tous les pays : Constatant l’extrême facilité d’apprentissage de la langue Espéranto et les éminents services qu’elle est appelée à rendre à la classe ouvrière organisée nationalement et internationalement : Pour ces motifs : Le IVème Congrès Confédéral invite les secrétaires de Fédérations Nationales, de Bourses du Travail, de syndicats ouvriers et les militants desdites organisations, à faire la plus active propagande pour l’étude, la pratique et l’extension de la langue internationale Espéranto et à créer, partout où ce sera possible, des cours du soir pour tous les travailleurs. Pour la Fédération Nationale des syndicats de peinture et parties assimilées. Le délégué : Léon ROBERT à Bousquet, Sellier, (employés), Marie, Janvion, P. Hervier (Bourges), Bornet (bûcherons), Ch Dooghe (Reims), Gouly (Toulouse), Yvetot, David (peinture), Tabard, Robert et Ferrier (Grenoble), Peyron, à Montagne (Inscrits maritimes du Havre. Intourville (alimentation).“
Le rapport et l’ordre du jour en faveur de l’Espéranto sont adoptés à l’UNANIMITÉ.

Du camarade Jouhaux, de la C.G.T. :

“Je crois nécessaire, indispensable, la diffusion dans les rapports entre prolétaires de langues diverses, d’une langue auxiliaire, intermédiaire commune.
Si cela était acquis, les discussions internationales deviendraient moins fastidieuses, plus claires et plus précises. C’est un progrès à réaliser, aussi j’applaudis des deux mains à tout ce qui pourra être tenté dans ce sens.
La création du Travailleur Espérantiste étant un pas de fait en cette voie, je ne puis qu’apporter avec mes souhaits de réussite, tous mes encouragements aux militants qui se sont voués à cette tâche.“

Du camarade Marie, secrétaire de l’Union des Syndicats :

“Voici l’opinion d’un bien involontaire profane de l’Espéranto. Sur la langue elle-même, je pèche coupablement par ignorance. C’est, hélas ! le cas de nombreux militants que les préoccupations, le travail et le temps fiévreusement employé, absorbent au point qu’ils souffrent de ne pouvoir posséder d’autres sciences.
C’est ce qui fait que je suis espérantiste de coeur. C’est peu, mais cela indique que ma préférence morale va vers la langue internationale que vous préconisez. Voici pourquoi : D’abord, c’est de l’Espéranto que j’ai entendu parlé en premier ; c’est cette langue que j’ai préconisée moi-même à cause du but qu’elle se promettait ; c’est encore cette langue qui eut la vogue dans les U.P. ; c’est l’Espéranto qu’approuvèrent les Congrès confédéraux ; c’est l’Espéranto dont l’Union des Syndicats de la Seine subventionne modestement un cours organisé par le Syndicat des Peintres de la Seine.
A cette préférence vient s’ajouter une appréhension cruelle.
L’Espéranto, né en 1887, était l’unique langue devant favoriser nos relations internationales et saper la confusion des langues nationales. C’était frane et clair. Depuis, ont surgi d’autres langues : Ido, Solrésol [remarque H.M. : erreur, le Solrésol a été proposé avant l’espéranto, en 1866], etc., lesquelles, avec l’Espéranto, compliquent encore cette confusion de langues nationales.
Nous tombons dans une profonde erreur. En voulant déblayer la route, nous l’encombrons davantage [1].
Maintenant, c’est affaire de propagande pour chaque école de s’arracher des adeptes. Situation bien pénible qui entache l’âme qui se donne une bien plus haute portée. Il faut pourtant bien que l’une triomphe de l’autre, car alors, mieux vaudrait apprendre trois ou quatre langues nationales que d’être obligé demain d’apprendre quinze langues internationales.

Salut syndicaliste."

1. Depuis l’Ido, une dizaine de projets ont vu le jour. C’est pour cette raison que l’Espéranto seul doit nous intéresser si nous voulons voir notre rêve se réaliser.

Le Travailleur Espérantiste”, janvier 1912

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Extrait de la Résolution générale adoptée par le 3ème congrès de SUD CULTURE (19-20 janvier 2006) :

I 16 : La défense de la pluralité culturelle passe par (...)
la résistance à l’uniformisation culturelle et au monopole de l’anglo-américain, et notamment en développant l’utilisation dans les échanges internationaux d’une langue qui n’appartient à aucun peuple et donc à tous : l’esperanto.

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Section française de l’Association Internationale des Travailleurs, la CNT/AIT, Confédération Nationale du Travail, anarcho-syndicaliste, utilise l’espéranto :

<http://cnt-ait.info/rubrique.php3?i...>